La CES a publié son manifeste pour les élections européennes de 2024, qui comprend 12 engagements pour "Offrir un accord équitable pour les travailleurs-euses", et qu'elle présentera au Parlement européen le 15 novembre 2023. Voir ci-dessous pour le texte complet.

La Confédération européenne des syndicats (CES) représente plus de 45 millions de travailleurs·euses et leurs 93 organisations syndicales nationales, ainsi que 10 fédérations syndicales européennes.

Les élections de 2024 au Parlement européen sont les élections parlementaires européennes les plus importantes depuis de nombreuses années. Elles détermineront le choix de l’Europe : rester sur la voie du progrès et de la solidarité défendue dans sa réponse à la crise du Covid-19, et soutenir les travailleurs·euses et leurs communautés sur tout le continent, ou revenir à l’austérité avec des attaques contre les travailleurs·euses.

La CES et ses organisations affiliées valorisent leur autonomie. Ce Manifeste est une invitation à approuver les engagements énumérés ci-dessous en tant que vision pour l’Europe pour les cinq prochaines années.

La vision portée par ce Manifeste est celle d’une Europe présentée comme une communauté de peuples et de nations où chacun est libre de vivre en paix et de travailler sans craindre la pauvreté, l’insécurité, le manque de respect, la discrimination, la violence, la guerre ou l’oppression : une Europe où il fait bon vivre, travailler, élever ses enfants, prendre soin de ses proches et prendre sa retraite et vieillir. Une Europe qui met en pratique le socle européen des droits sociaux. Une Europe qui protège les droits humains fondamentaux, y compris les droits reproductifs, et qui s’efforce de parvenir à l’égalité de genre.

Nous invitons tous les partis et candidat·es européen·nes à soutenir ces valeurs et priorités, qui sont tirées de la Charte des valeurs de la CES, du Manifeste de Berlin et du programme d’action adoptés par les dirigeant·es syndicaux de toute l’Europe lors de notre 15e Congrès en mai 2023.

Nous appelons les partis, les mouvements et les travailleurs·euses à repousser la menace de l’extrême droite, qui prétend malhonnêtement soutenir les travailleurs·euses quand, en réalité, elle attaque leurs syndicats et leurs droits démocratiques, démantelant les droits de l’homme et les droits des femmes en particulier.

La coopération avec les forces d’extrême droite au sein du Parlement européen et d’autres institutions européennes doit être rejetée.

Nous appelons les travailleurs·euses, les étudiant·es, les retraité·es et tous les citoyen·nes européen·nes à voter aux élections européennes et à faire entendre leur voix pour une Europe plus juste et plus sociale.

Malgré les avancées obtenues par les syndicats et d’autres forces progressistes, le besoin de justice sociale est criant en Europe. Au cours de l’année écoulée, les travailleurs·euses ont subi des réductions de salaire record en termes réels, tandis que des employeurs peu scrupuleux continuent d’enregistrer des profits sans précédent. Pendant ce temps, les institutions de l’UE menacent de revenir à l’austérité et d’ouvrir la porte à une nouvelle déréglementation, punissant davantage les travailleurs·euses.

Au lieu de cela, nous avons besoin d’élections européennes pour mettre en place un Parlement et une Commission déterminés à oeuvrer en faveur d’une Europe équitable avec des emplois sûrs, des salaires décents, d’excellents services publics, droits des femmes et l’égalité pour tous, des droits des travailleurs·euses forts et une négociation collective et un dialogue social renforcés. Les attaques contre les syndicats doivent être évitées : la lutte antisyndicale doit être punie comme un crime ! Cela est nécessaire pour défendre et renforcer la démocratie en Europe.

Ensemble, nous sommes capables de mener à bien cette mission essentielle pour une Europe que nous serons fiers de transmettre aux générations futures.

DOUZE ENGAGEMENTS POUR UN ACCORD EQUITABLE POUR LES TRAVAILLEURS·EUSES

MANIFESTE DE LA CES - ÉLECTIONS EUROPÉENNES 2024

1 De meilleurs emplois et revenus

Prendre des mesures efficaces à l’échelle de l’UE pour protéger les emplois et les revenus, y compris les retraites, avec des mesures décisives pour aborder la dimension sociale de la crise du coût de la vie, l’Europe a besoin d’une augmentation des salaires. Promouvoir les augmentations de salaires et soutenir la convergence vers le haut des revenus et des conditions de travail, notamment par l’introduction d’un cadre européen pour promouvoir la convergence vers le haut des salaires, et une action renforcée au niveau de l’UE pour éliminer l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes.

2 Mettre fin au travail précaire et améliorer les conditions de travail

Mettre fin au travail précaire en garantissant les droits légaux aux CDI et au travail à temps plein, et en interdisant les stages non rémunérés. Accroître le contrôle qu’ont les travailleurs·euses sur la flexibilité de leurs horaires et réduire le temps de travail. Protéger les droits des télétravailleurs·euses, y compris le droit à la déconnexion Protéger les droits des télétravailleurs·euses, y compris le droit à la déconnexion et l’interdiction de la surveillance invasive et irrespectueuse.

3 Soutien aux syndicats, à la négociation collective et au dialogue social

Défendre et renforcer les droits syndicaux et les droits des travailleurs·euses, y compris le droit universel de former des syndicats, l’accès des syndicats aux lieux de travail, le droit de négociation collective et le droit de grève. Accroître la couverture de la négociation collective, y compris par une transposition ambitieuse de la directive sur des salaires minimums adéquats, visant une couverture de 80 %, et de la directive sur la transparence des rémunérations entre femmes et hommes. Améliorer la démocratie au travail en premier lieu en renforçant la négociation collective, en introduisant un cadre européen global sur l’information, la consultation et la participation et garantir pleinement le bon fonctionnement des systèmes de négociation collective.

4 Travail sécurisé

Améliorer et étendre la législation européenne en matière de santé et de sécurité au travail et d’autres initiatives européennes pour atteindre zéro décès au travail ou causé par le travail, y compris les travailleurs·euses domestiques. Lutter contre les risques psychosociaux, le harcèlement et la honte en ligne au travail grâce à une directive européenne. Introduire une législation européenne qui fixe des limites de température au travail. Développer des initiatives pour assurer la pleine application des droits des travailleurs·euses et des syndicats et renforcer les services d’inspection du droit du travail et du droit social et les mécanismes de plainte. Garantir la fin de toutes les formes de violence basée sur le genre dans le monde du travail, y compris en ligne.

5 Rejeter l’austérité - une économie pour les gens et la planète

Rejeter le retour aux politiques d’austérité et promouvoir un nouveau modèle économique centré sur l’économie réelle, la création d’emplois, le travail décent et la redistribution par une fiscalité juste et progressive. Assurer une révision des règles de gouvernance économique, qui comprend la fin du Pacte fiscal de l’UE et la réforme du Pacte de stabilité et de croissance visant à l’aligner sur la réalisation des droits inclus dans le Socle européen des droits sociaux. Fournir aux États membres la marge de manoeuvre nécessaire pour financer les investissements nécessaires à une double transition équitable. Mettre en oeuvre une nouvelle capacité budgétaire d’investissement, un fonds de souveraineté de l’UE pour une transition socio-économique juste et des biens communs, ne laissant personne ni aucune région de côté. Réguler les marchés des matières premières financières, énergétiques et alimentaires et lutter contre la spéculation. Combattre la fraude et l’évasion fiscales et veiller à ce que les bénéfices excessifs soient imposés.

6 Une politique industrielle et des services publics forts

Mettre en oeuvre une politique industrielle européenne forte prévoyant des investissements publics et privés significatifs et efficaces qui sont à la base d’emplois de qualité et du progrès social. Garantir un accès universel fondé sur les droits à des services publics de qualité, y compris la garde d’enfants et le transport. Garantir le plein respect du droit à un logement adéquat, décent et abordable. Garantir des services de qualité et le droit des travailleurs·euses à l’accès à des services de qualité.

7 L’argent public au service du progrès social

Appliquer des conditions fortes couvrant des critères sociaux, fiscaux et environnementaux, liés à toutes les formes de financement public et de soutien aux entreprises. Revoir les règles européennes de passation des marchés publics afin que l’argent public aille aux organisations qui respectent les droits des travailleurs·euses et des syndicats, qui négocient avec les syndicats et dont les travailleurs·euses sont couverts par des conventions collectives.

8 Assurer des transitions justes

Garantir une transformation numérique juste basée sur la numérisation centrée sur l’humain et la régulation efficace de l’IA et intégrer le principe du « contrôle humain » dans le droit de l’UE. Atteindre les objectifs climatiques par une transition juste, y compris une directive pour une transition juste dans le monde du travail par l’anticipation et la gestion du changement, basée sur les principes de l’implication syndicale et de la négociation collective. Garantir le droit pour tous à des formations tout au long de la vie, sans frais pour les travailleurs·euses et pendant le temps de travail.

9 Lutte contre le dumping social et la fraude

Réglementer le rôle des intermédiaires du travail et introduire un cadre juridique européen global limitant la sous-traitance et garantissant la responsabilité conjointe et solidaire dans toute la chaîne de sous-traitance. Améliorer l’application des règles de mobilité de la main-d’oeuvre grâce à une Autorité européenne du travail (ELA) plus efficace.

10 Une approche juste et fondée sur les droits en matière de migration et d’asile

Renforcer les voies migratoires sûres, légales et régulières, améliorer la protection, les droits et le soutien aux migrants et aux demandeurs d’asile au sein de l’UE. Sauver des vies en Méditerranée et aux frontières extérieures, notamment en réintroduisant un mécanisme européen de recherche et de sauvetage. Refuser les politiques d’externalisation des frontières et s’opposer aux accords multilatéraux et bilatéraux avec des États qui ne respectent pas l’État de droit et les droits de l’homme.

11 Un rôle progressiste de l’Europe dans le monde

Veiller à ce que l’UE agisse à l’échelle mondiale et par sa politique commerciale, dans le respect de notre modèle social, pour promouvoir la paix, la démocratie, les droits de l’homme, la règle de droit et la justice économique mondiale, y compris pour mettre fin à la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine.

12 Une Europe plus juste et plus démocratique

Établir un protocole de progrès social, à inclure dans les traités, pour garantir que les droits sociaux et les droits des travailleurs·euses l’emportent sur les libertés économiques. Promouvoir une réforme des institutions européennes pour garantir une UE plus sociale et démocratique. Soutenir l’élargissement de l’UE fondé sur le plein respect des droits sociaux et des travailleurs·euses, du dialogue social et de l’acquis social européen. La CES et nos affiliés demandent aux partis et candidat·es européen·nes de soutenir les valeurs et les priorités des travailleurs·euses et des syndicats énoncées dans ce Manifeste pour les élections de 2024 au Parlement européen – et de travailler avec nous à la mise en oeuvre de mesures spécifiques en vue de soutenir ces valeurs et priorités européennes au Parlement pour la période 2024-2029.